Sommaire

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Cette proposition, qui est présentée au Comité spécial sur la réforme électorale (ERRE), porte sur une forme de représentation proportionnelle qui intègre le système uninominal majoritaire à un tour actuel. Comme tant d’autres personnes, nous souhaitons que chaque vote compte et que le Parlement agisse en prenant vraiment en considération la volonté de tous les Canadiens. C’est pourquoi nous présentons ce mémoire destiné aux deux Chambres du Parlement, le tout dans le but de remplir le mandat du Comité spécial sur la réforme électorale.

Qu’est–ce qu’un système bicaméral à représentation proportionnelle mixte?
Le système bicaméral à représentation proportionnelle mixte (BPM) introduit une nouveauté en élargissant le champ d’action de la politique canadienne au-delà du système électoral et en s’attaquant à un autre problème apparemment insoluble lié à ce système politique, soit le Sénat. Le système BPM réinvente le Sénat en le mettant à contribution pour introduire la proportionnalité au Parlement.

Compte tenu de l’importance de la réforme électorale et du mécontentement des Canadiens envers le Sénat, nous encourageons le Comité spécial sur la réforme électorale à envisager d’améliorer le fonctionnement des deux Chambres du Parlement (de là, le terme « bicaméral »). Le système BPM résout ces deux problèmes avec une seule réforme.

Fonctionnement du système bicaméral à représentation proportionnelle mixte
Le système bicaméral à représentation proportionnelle mixte est fondé sur le système mixte avec compensation proportionnelle (ou MCP), lequel prévoit qu’une seule assemblée législative est créée à partir d’une combinaison de « sièges de circonscription » et de « sièges de liste ». Chaque siège de circonscription est détenu par le gagnant de cette circonscription, ou comté, tel que déterminé lors d’élections. Après que chaque siège de circonscription a été attribué, les sièges de liste restants sont répartis entre les partis sous-représentés à l’issue du vote populaire. Par exemple, si le parti mauve obtient 10 % des votes mais seulement 5 % des sièges de circonscription, on lui attribuerait suffisamment de sièges de liste pour qu’il détienne 10 % de l’ensemble des sièges à l’Assemblée législative.

En vertu de ce système, les 338 sièges de circonscription à la Chambre des communes sont chacun attribués à un seul député par circonscription électorale, comme ils l’ont toujours été. Les sièges de « liste » sont attribués au sein du Sénat, soit aux partis qui sont sous-représentés au Parlement à l’issue du vote populaire (principe 3 énoncé dans le mandat du Comité spécial sur la réforme électorale : accessibilité et inclusion)[1]. Cela introduit la proportionnalité dans les deux Chambres.

Grâce au système BPM, le Parlement passera de ceci[2] :
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… à :
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Le système BPM s’inscrit dans l’évolution de notre système de gouvernement britannique. La grande différence, c’est qu’en vertu du système BPM, le Sénat serait revitalisé dans la mesure où il s’exprimerait au nom des gens sous-représentés. Les Canadiens profiteront d’un Parlement amélioré tout en conservant le bulletin de vote qu’ils connaissent bien.

De plus, en mettant le Sénat à contribution, le système BPM assure une représentation proportionnelle au sein des provinces et territoires, ainsi qu’à l’échelle nationale. Par conséquent, les minorités de partout au Canada acquièrent le droit à la représentation, qu’ils soient des électeurs néo-démocrates de l’Ouest canadien ou des électeurs conservateurs du Canada atlantique. Avec le système BPM, même si la représentation dans une chambre peut être disproportionnelle au regard des résultats du vote populaire, la proportionnalité est obtenue dans l’ensemble du Parlement (principe 1 : efficacité et légitimité).

POURQUOI opter pour le système BPM?

La plupart, voire la totalité, des autres options de représentation proportionnelle examinées par le Comité spécial sur la réforme électorale ne s’appliquent qu’à la Chambre des communes, de sorte que la moitié du Parlement ne représenterait toujours pas les choix des Canadiens en vertu de ces options. De nombreux Canadiens ne s’identifient pas aux sénateurs qui les représentent[3] et il est facile de comprendre pourquoi. Non seulement un parti peut-il accaparer la totalité du pouvoir en obtenant moins de la moitié des votes à la Chambre basse du Parlement, mais les Canadiens n’ont quant à eux aucune influence sur le choix des personnes qui les représentent à la Chambre haute. Chaque siège gagné au Parlement en vertu du système BPM reflète la volonté des Canadiens (principe 2 : participation). Ce système réaffirme le principe voulant que la Constitution oblige le Sénat à assurer une représentation et un équilibre régionaux pour les dossiers de ressort fédéral. Il permet de réaliser ce principe sans ajouter de sièges au Parlement ni changer la méthode de scrutin.

2015-bmp-pie-chart-figure-a-1-with-titleIl procure aussi une plus grande stabilité que la plupart des autres modes de représentation proportionnelle. En vertu du système de gouvernement responsable que le Canada utilise actuellement, le gouvernement doit être démis de ses fonctions s’il perd la confiance de la Chambre des communes. La probabilité que cela se produise est plus élevée lorsque la Chambre des communes est seule à élire ses députés selon le mode de représentation proportionnelle conventionnel. Mais rien dans la Constitution ni dans une quelconque convention constitutionnelle ne prévoit que le gouvernement doive être démis de ses fonctions s’il perd la confiance du Sénat. Le pire qui pourrait arriver, ce serait que le Sénat refuse d’adopter les projets de loi de la Chambre des communes qui, selon lui, doivent être retravaillés, et vice versa. Mais les choses devraient fonctionner exactement de cette façon-là au sein d’un gouvernement qui représente divers intérêts. Pour être adopté tant à la Chambre des communes qu’au Sénat, un projet de loi devrait normalement être jugé satisfaisant par plus qu’un parti, ce qui permettrait de créer des lois qui résulteraient d’une collaboration accrue et qui refléteraient les divers points de vue des Canadiens (principe 4 : intégrité).

L’un des nombreux avantages liés à la RMBCP réside dans le fait que le système électoral peut demeurer exactement le même. Les Canadiens peuvent utiliser un bulletin de vote unique lorsqu’ils votent pour un député local (principe 5 : représentation locale). Grâce au système BPM, ce même bulletin de vote permet aux Canadiens de choisir tous leurs représentants, de sorte que chaque vote compte.

Comment les sénateurs seraient-ils sélectionnés?
Le nombre de sièges au Sénat est déterminé pour chaque parti méritant d’être représenté davantage dans l’optique de la proportionnalité en fonction du nombre de sièges bicaméraux combiné pour chaque province ou territoire. Ces sièges pourraient être attribués aux candidats ayant obtenu le plus de votes lors du scrutin électoral. Même les candidats indépendants ayant fini bon deuxièmes dans leur comté pourraient, en théorie, devenir sénateurs.

Qu’advient-il des sénateurs en poste?
Les sénateurs peuvent se démettre de leurs fonctions lorsqu’on dissout le Parlements[4]. Mais le système BPM pourrait quand même accroître l’équilibre au Parlement dans la mesure où aussi peu que 20 sièges seraient laissés vacants même si les députés sortants restaient en fonction (voir l’annexe D).

2015-election-bar-chart-figure-a-2-with-titleSecond examen objectif
Selon la Cour suprême du Canada, les rédacteurs de la Constitution souhaitaient que les sénateurs profitent de l’« inamovibilité », ce qui leur permet d’agir « en toute indépendance lorsqu’ils procèdent à l’examen des projets de loi »[5].

Même si cela correspondait peut-être à l’intention initiale des rédacteurs, une majorité de Canadiens ne souscrit plus à ce principe[6]. On peut croire que les sénateurs de divers partis ayant des points de vue différents pourraient examiner les projets de loi de façon plus adéquate. Le système BPM aurait pour effet d’améliorer le « second examen objectif » dans la mesure où l’on passerait de l’indépendance à l’imputabilité.

Est-il nécessaire de modifier la Constitution pour mettre le système BPM en œuvre?
La façon la plus efficace de mettre le système BPM en œuvre serait de modifier ou d’abroger les articles 24, 29 et 32 de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, 1867. Ces modifications devraient être effectuées en vertu de la procédure du 7/50 (qui requiert l’approbation du Parlement et de sept provinces comptant pour au moins la moitié de la population)[7]. Dans l’intervalle, le système BPM pourrait être mis en œuvre de plusieurs façons. Par exemple, lorsque des négociations constitutionnelles ont lieu, un premier ministre qui adhère au système BPM devrait geler les nominations et voir ensuite à combler tous les sièges vacants au Sénat en tenant compte des résultats électoraux tels qu’établis en fonction de ce mode de représentation[8]. Cela est un exemple d’application flexible du mode BPM.

Nous reconnaissons que toute affaire qui met la Constitution en cause peut être difficile à régler mais, s’il est possible de créer un meilleur gouvernement, nous devrions faire des efforts pour y arriver.

CONCLUSION

Le système bicaméral à représentation proportionnelle mixte (BPM) est l’une des réformes les plus simples à mettre en œuvre dans la mesure où il n’est pas nécessaire de modifier le bulletin de vote, les circonscriptions électorales et le mandat des sénateurs actuels. Il permet aussi d’élire des gouvernements forts et stables soumis au contrôle d’un Sénat doté d’attributions plus pertinentes. Les Canadiens sauront que leur vote déterminera la composition du Parlement dans son ensemble, ce qui réduira le nombre de votes stratégiques et atténuera l’apathie des électeurs.

Le principe du système BPM veut que l’on accroisse la proportionnalité de l’ensemble du Parlement ou, autrement dit, du Parlement bicaméral, en fonction des résultats électoraux. Un Sénat organisé suivant ce principe permettrait de constituer un Parlement correspondant beaucoup plus au vote populaire.

Oui, le système BPM nécessitera peut-être certaines modifications d’ordre constitutionnel, mais la Constitution est un [traduction] « arbre vivant » qui est destiné à évoluer selon [traduction] « les réalités de la vie moderne »[9]. Et les divers paliers de gouvernement devront, au bout du compte, travailler ensemble pour que les Canadiens puissent profiter d’une démocratie représentative. Le système BPM aurait pour effet de créer un Parlement qui représenterait les intérêts des Canadiens en appliquant une solution conçue ici. Tout cela pourrait être réalisé à l’aide d’un bulletin de vote simple et unique.

Pour de plus amples renseignements, veuillez consulter les annexes ainsi que notre site Web à www.bmp-bpm.ca.

Notes de fin

  1. ^ Chambre des communes, Journaux, 42e lég., 1e ses., no. 67 (7 juin 2016).
  2. ^ Voici la répartition des sièges le jour des élections fédérales de 2015; voir le site Web du Parlement de Canada, Élections, (Ottawa, base de données de la Bibliothèque du Parlement, aucune date), en ligne : Parlement du Canada (dernière visite : 5 octobre 2016).
  3. ^ « Two-in-three Canadians say the Senate is “too damaged” to ever earn their goodwill » (3 mai 2016), en ligne : Angus Reid Institute (dernière visite : 5 octobre 2016) [Angus Reid].
  4. ^ Acte de l’Amérique du Nord britannique, 1867 (R.-U.), 30 et 31 Vict. ch. 3, s. 30, réimprimé dans L.R.C. 1985, App. II, no 5.
  5. ^ Renvoi relatif à la réforme du Sénat, 2014 SCC 32 au para. 79, [Renvoi relatif au Sénat].
  6. ^ Angus Reid, supra, note 3; Daniel Bitonti, « CTV Poll: 69% of Canadians don’t believe Senate is useful », CTV News (1 janvier 2014) en ligne : Bell Média.
  7. ^ Renvoi relatif au Sénat, supra note 4 aux para. 71-85.
  8. ^ Ce scenario devrait être constitutionnel comme dans le Renvoi relatif au Sénat, idem aux para. 71-85.
  9. ^ Edwards c. Attorney‑General for Canada, [1930] A.C. 124 (C.P.) à la p. 136; Renvoi relatif au mariage entre personnes du même sexe, 2004 SCC 79 au para. 22.